Une autre culture ?

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Bref, j'ai pu constater que, soit le développement des transports aériens n'avait pas encore atteint l'aéroport international de Strasbourg-Entzheim, soit il l'avait déjà fui.
Il faut dire que depuis l'affaire DHL en 1996, puis le départ de Ryanair en 2003, suite au recours de Brit Air, filiale d'Air France, la situation de l'aéroport international de Strasbourg-Entzheim périclite.
Que l'aéroport international de Strasbourg-Entzheim disparaisse ne me paraît pas choquant en soi, même si, en termes d'image, la ville de Strasbourg a du mal à le concevoir, elle qui se veut capitale de plein de choses, y compris de l'Europe.
Ce qui me fait décoller de mon siège, c'est plutôt le traitement de cette longue agonie et l'acharnement thérapeutique à coup d'aides publiques. Pourtant, à regarder les chiffres de la fréquentation, l'issue paraît inéluctablement fatale. 2 037 000 passagers en 2006, 1 333 000 en 2008 et prévision de 1 163 000 pour 2009 !
Mais comme c'est si souvent le cas, quand ça va mal, on rafistole comme l'on peut plutôt que de prendre des décisions plus radicales.
En l'occurrence, pourquoi ne pas prendre la décision de fermer l'aéroport international de Strasbourg-Entzheim, décision certes difficile à prendre mais courageuse et faire d'une faiblesse d'aujourd'hui une force pour demain ?
Imaginons : Strasbourg renonce à son aéroport. Strasbourg, capitale de l'Europe, s'engage pour un environnement à l'empreinte carbone réduite. Strasbourg dit non aux avions, mais Strasbourg vous attend et Strasbourg ira vous cherchez où que vous arriviez. Ça a de la gueule, non ??
Vous devez vous dire que Le Strasbourgeois délire, qu'il a du plomb dans l'aile ? Je ne crois pas. Au contraire. Explications :
- De Bâle-Mulhouse à Francfort, existent 6 aéroports (EuroAirport, Stuttgart, Francfort, Karsruhe/Baden, Entzheim et Lahr).
Au total, dans un rayon de 240 km, on en dénombre une douzaine.
© i-strasbourg.com 2005
- Bâle attire plus de 4 millions de passagers, Stuttgart près de 10 millions, Francfort plus de 50 millions et Baden est au même niveau que Strasbourg en termes de fréquentation.
- Depuis 2007, les lignes au départ de Strasbourg et à destination de Moscou, Vienne, Munich, Istanbul et Milan ont fermé.
- La ligne vers Bruxelles est fortement concurrencée par des TGV spéciaux lors des sessions parlementaires.
- Il n'y a que 12 destinations internationales contre 73 à Bâle-Mulhouse.
Pas la peine d'en dire plus. Ça va mal.
Mais quand ça mal, on accuse les autres, c'est tellement plus facile. Les méchants suisses et allemands qui osent concurrencer de manière déloyale notre tout beau et tout joli aéroport. Cependant, la concurrence est la même pour eux, mais ils se développent, c'est bizarre, vous ne trouvez pas ?
J'ai même lu que la navette Lufthansa (6 départs quotidiens de Strasbourg et à destination de Francfort) agissait "comme « prédateur » des lignes opérées par les compagnies aériennes depuis l'aéroport de Strasbourg." Depuis que j'ai lu ça, j'évite de croiser, surtout la nuit, cette navettus horribilis, monstre aux longues dents jaunes et blanches.
Arrêtons 5 minutes de se foutre de la gueule du monde et de taper sur les autres. Ce ne sont pas les suisses et les allemands, mais les riverains de l'aéroport international de Strasbourg-Entzheim (ils étaient 15 000 dans les rue de Strasbourg le 14 septembre 1996 répondant à l'appel de l'Union pour la fermeture de nuit de l'aéroport de Strasbourg-Entzheim) qui ont fait virer DHL.
Ce ne sont pas les suisses et les allemands, mais Air France qui a fait dégager Ryanair en 2003, à Baden justement (juste pour se faire du mal, en 2002, Ryanair transportait 15 000 personnes par mois vers Londres, 3 500 aujourd'hui avec Air France).
Ce ne sont pas les suisses et les allemands, mais Air France qui, préférant alimenter ses "hubs" de Paris CDG, Amsterdam et Lyon, ne cherche qu'à obtenir la meilleure rentabilité au siège sans passer par une augmentation du nombre de passagers ou des destinations au départ de Strasbourg, aboutissant au final à la fermeture de lignes nationales.
Et pourtant, les politiques s'entêtent à coups de millions d'euros. Ils financent l'installation de la gare d'Entzheim aéroport pour rejoindre le centre ville en 9 minutes, avec 4 fréquences par heure dans les 2 sens de 5h30 à 23h30, avec une liaison piétonne semi couverte de 120 mètres permettant d'accéder directement des quais de gare à l'aérogare. Ils financent des plans stratégiques de développement de l'aéroport et notamment, mais attention à ne pas rire, "une action de lobbying auprès d'Air France afin d'améliorer la qualité de service et de rendre la politique tarifaire plus attractive" (source, Le Strasbourgeois), comprenez, faites un sourire au passager et baissez un peu vos tarifs et on vous filera plein de thunes.
Et pourquoi ne pas financer, sérieusement, intelligemment, avec un cadencement réfléchi, le développement de navettes, par cars ou trains régionaux et/ou binationaux, vers les aéroports suisses et allemands et de décider, courageusement, de fermer l'aéroport international de Strasbourg-Entzheim ?
En termes d'image, la fermeture serait moins désastreuse que celle qu'a, aujourd'hui, le pauvre touriste arrivant à l'aéroport de Baden et cherchant une navette pour Strasbourg. Il peut toujours chercher, il n'y en a pas. Enfin si, mais privée et sur réservation préalable.
A l'EuroAirport de Bâle-Mulhouse, il y a bien une navette qui vous amène à la gare de Mulhouse, mais après une certaine heure, il n'y a plus de train pour Strasbourg. Et vous dormez à la gare, c'est chouette, non ???
A mon avis, en termes d'image, de telles mésaventures sont dévastatrices pour Strasbourg, bien plus que ne pourrait l'avoir la fermeture de l'aéroport international de Strasbourg-Entzheim.
Et vous, qu'en pensez-vous ?