jeudi 14 janvier 2010

5 600 places de stationnement payantes, en plus, d'un seul coup d'un seul! Qui dit mieux ?

Avant tout, je vous souhaite une excellente année 2010. Je souhaite une même excellente année à Strasbourg. Qu'elle devienne une ville audacieuse, dynamique, impertinente, innovante, folle, joyeuse, avant-gardiste, ouverte, courageuse, volontaire, entreprenante… En somme, une ville passionnée et passionnante.

Que voulez-vous, cette période de vœux est propice aux rêves les plus fous.

Mais revenons-en au sujet qui me préoccupe.

Oui je sais… je vous entends déjà.

Mais qu'arrive-t-il au Strasbourgeois, lui qui prône l'usage du vélo et qui critique maintenant une politique visant à chasser les voitures ?

Pourquoi Le Strasbourgeois est-il contre la taxation des voitures ?

Pourquoi Le Strasbourgeois est-il contre un centre ville avec moins de voitures ?

Ok ok j'entends bien. Mais laissez-moi m'expliquer sur le sujet. Je n'ai même pas commencé mon billet.

Petit rappel des faits :

Début novembre 2009, le conseil municipal de la Ville de Strasbourg a approuvé la création de 5 600 places de stationnement payantes supplémentaires.

Selon Monsieur Olivier BITZ, adjoint en charge de la circulation et du stationnement, "le périmètre qui a été soumis à l'avis des conseils de quartiers, est particulièrement ambitieux, puisqu'on va passer de 7 900 places actuellement à 13 500 places, soit une augmentation de 70 %."

Effectivement, c'est ambitieux. Enfin…non… ce n'est pas ambitieux d'augmenter le nombre de places payantes de 70 %, c'est juste réel.

Je relis la phrase de Monsieur BITZ : "le périmètre qui a été soumis à l'avis des conseils de quartiers, est particulièrement ambitieux (…)"

Ça ne veut rien dire un périmètre ambitieux.

La politique qui accompagne cette extension est peut être ambitieuse… pas le périmètre. Et c'est là que le bât blesse.

Voici ce que j'ai pu lire dans le Strasbourg magazine n° 208 du mois de décembre 2009, sous l'article intitulé "Extension du stationnement payant. Un plus pour le cadre de vie" (dès le titre, je tique… "un plus pour le cadre de vie"… ben voyons !!!)

Selon cet article, "nous ne pouvons plus accepter que des voitures restent scotchées du matin au soir sur un emplacement gratuit, aux dépens des résidents (…) Nous devons répondre à une double problématique : celle de l'environnement – et il n'y a guère que quelques inconscients pour nier le réchauffement climatique – mais aussi le bien-être des résidents. Dans les zones concernées, ils bénéficieront d'un tarif préférentiel. Il ne s'agit pas de faire une opération pièces jaunes pour la Ville, mais bel et bien d'assurer le bien-être du plus grand nombre (…)" Et bla bla bla.


Environnement et bien-être des résidents sont donc les deux mamelles de l'extension du stationnement payant.

Et quid de l'opération pièces jaunes ?

Le stationnement payant a deux sources de recettes : les horodateurs et le tarif résident de 10 € par mois.

Pour savoir ce que rapporte cette politique, que j'imagine juteuse, j'ai téléphoné au service concerné de la ville de Strasbourg (03.88.43.63.04).

Comme personne, Place de l'Etoile, n'a voulu me dire combien rapportent, par an, les horodateurs, ni quel est le nombre d'abonnés résidents… faisons nos petits calculs dans notre coin.

Pour mémoire, ces calculs ne tiennent compte que du seul tarif résident à 10 € par mois, sans le jackpot des horodateurs.

1° Petit calcul tout simple :

13 500 places payantes à 10 € l'abonnement mensuel = 135 000 €
Multiplié par 12 (le nombre de mois dans une année) = 1 620 000 €.

Effectivement, on est plus dans l'opération pièces jaunes, mais dans l'opération pièces bicolores.

2° Voyons plus large :

Strasbourg : 267 000 habitants.

Admettons que 50 000 Strasbourgeois aient un abonnement résident à 10 € le mois, ça nous met l'opération pièces jaunes à 6 000 000 d'€ l'année, ou plutôt l'opération billets jaunes.

3° Et soyons carrément fous :

100 000 abonnements résident : 12 000 000 d'€ l'année. Opération billets violets.

A 195 000 euros le super-géant-sapin-de-Noël-qui-est-tellement-grand-que-c'est-le-deuxième-plus-grand-du-monde-après-celui-de-Rockfeller-Center-de-New-York, ça nous laisse plus de 61 années de sapin place Kléber et pourquoi pas, un jour, le plus grand du monde.

Ambitieuse cette politique ? Ben ça j'en sais fichtre rien. Rentable ? Et comment !!!

Mais redevenons sérieux deux minutes.

Pour ceux qui connaissent un peu la ville de Strasbourg, il faut bien reconnaître que l'arrivée du stationnement payant a du bon.

Ainsi, dans le quartier de la Place de la République (rue du Maréchal Foch et alentours) il est plutôt aisé de s'y garer depuis que le stationnement est devenu payant.

En cela, Monsieur BITZ a raison. Mais il oublie de dire que le problème n'a fait que se déplacer et qu'aux abords des Contades, c'est devenu la jungle.

Aujourd'hui on va taxer les Contades et demain le problème se déplacera ailleurs.

Pour ceux qui habitent route de la Wantzenau, à la Robertsau, attention, tout Strasbourg va bientôt venir se garer chez vous, le périmètre du stationnement payant n'ayant visiblement plus aucune limite, celui du centre ville ayant une fâcheuse tendance à s'étendre, s'étendre, s'étendre.

Alors, que la Ville ait une vraie politique de transports urbains et souhaite encourager le développement de la fibre environnementale de ses concitoyens, je ne peux qu'applaudir.

Mais qu'on explique à ces mêmes concitoyens quelle est cette politique, quelles en sont les raisons, quels en sont les buts et pourquoi le parc de stationnement payant va augmenter, d'un coup d'un seul, de 70 %.

A ma question toute simple qui était de savoir comment combiner le bien-être des résidents et le fait de ne pouvoir bénéficier que d'un seul tarif résident par foyer même si le foyer possède plus d'un véhicule, la Ville m'a répondu la chose suivante :

"Nous n'avons pas de réponse. Nous ne traitons pas ces demandes. C'est bien le problème de la Ville. Il y a trop de voitures. Il n'y a qu'un seul tarif résident par foyer. Pour les autres véhicules du foyer, ce n'est pas notre problème."

Ce n'est pas sérieux de répondre ça.

Et je n'ai rien contre l'agent qui m'a répondu, au demeurant, fort courtois et bien désolé de ne pouvoir répondre positivement à mes questions.

Mais j'aurai voulu autre chose que cet article fumeux et niais de Strasbourg magazine, avec son "plus pour le cadre de vie" et autre "bien-être du plus grand nombre".

J'aurai voulu avoir de vraies explications.

Par exemple :

- Quel est le nombre de "voitures tampon" à Strasbourg ? (la voiture tampon, à ne pas confondre avec la voiture bélier, est la voiture d'un automobiliste qui fait le trajet domicile-travail mais qui n'habite pas à Strasbourg et qui se gare en ville).

- Combien de "voitures tampon" ont-elles disparues après la précédente extension du parc payant ?

- Quelle est la corrélation entre l'augmentation du nombre de places payantes et la fréquentation des parkings relais ou des parkings en ouvrage ?

- Quel est le nombre de personnes qui ont abandonné leur voiture pour venir à Strasbourg et qui ont choisi les transports en commun ?

- Combien de strasbourgeois ont-ils définitivement renoncé à posséder une voiture suite à l'extension sans fin des zones payantes ?

Mais non, ça c'est trop demander. Faudrait réfléchir, compter, comprendre, analyser, proposer… Alors que là, on étend et on taxe… c'est beaucoup plus rapide, beaucoup plus facile et beaucoup plus rentable.

Alors je ne peux pas m'empêcher de penser que cette politique, sous couvert d'amélioration du cadre de vie et d'augmentation du bien-être du plus grand nombre, n'est rien d'autre qu'une immense arnaque ayant pour principal objectif de faire rentrer facilement du fric dans les caisses de la Ville.

Et même si ce n'est pas le principal objectif, la Ville ne devrait pas avoir l'outrecuidance de dire que ce n'est pas une opération pièces jaunes, mais avoir au minimum la décence de reconnaître que, oui, ça va faire rentrer de l'argent, ce qui permettra à la Ville de développer le réseau des crèches publiques, d'enterrer les bennes de recyclages du verre et du papier, de créer un marché couvert, d'avoir une politique incitative permettant l'ouverture de boutiques indépendantes (comme à Bruxelles par exemple), afin de redynamiser le centre de la cité… que sais-je encore.

Pour finir et redevenir très égocentrique, j'attends maintenant avec impatience la nouvelle extension des zones payantes, en priant très très fort pour que mon quartier soit concerné.

Et oui, j'habite en ville. J'ai une voiture dont je me sers très très peu. D'ailleurs suis-je un tampon ? Un résident ? Un résident tampon ?

Et je vais me retrouver à la frontière d'une zone payante. Mais je n'aurai pas le droit à un tarif résident, parce que je ne réside pas dans une zone payante (vous suivez ?). Et maintenant je vais galérer pour pouvoir me garer.

Vivement que, moi aussi, je puisse participer à cette gigantesque "non opération pièces jaunes", afin de pouvoir jouir, au quotidien, du bien-être promis par la Ville à ses concitoyens, propriétaires d'une seule voiture et résidant dans une zone payante.

Le bien-être à 120 € par an, finalement, c'est pas cher, vous ne trouvez pas ???

4 commentaires:

  1. et l'autopartage ? Pas intéressé ?

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  2. Si, évidemment. Mais ce billet était centré sur la politique de stationnement payant. Au sujet de l'autopartage, l'article de Strasbourg magazine précise que de nouvelles stations vont être créées et que 500 arceaux à vélos supplémentaires seront installés. Mais ne nous leurrons pas, vider le centre ville des voitures reste mission impossible, enfin aujourd'hui. Remarquez d'ailleurs, que d'un côté on tape sur les résidents avec voitures, mais de l'autre, dès que Peugeot ou Renault ne vend plus ou moins de voitures, l'Etat se dépêche de nous donner de l'argent (bonus écologique, prime à la casse...) pour acheter une voiture. Il faudra un jour harmoniser tout ça pour ne pas avoir l'impression d'être entre le marteau et l'enclume.

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  3. Je suis entièrement d'accord avec ce que dit le Strasbourgeois sur les primes à l'achat des voitures et la fin du parking en centre ville. C'est fou ce paradoxe, qui place comme à chaque fois le consommateur dans une situation schizo. Donc, en fait, à la fin, ma prime à la casse me sert à payer X années de parking en ville...

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  4. Super article !
    Quant au "problème" des voitures tampons, des villes comme Londres ont réglé ça en mettant des péages à chaque porte d'entrée de la ville.
    Une solution pour motiver à prendre le tram ?
    Ceci étant, la voiture n'est pas un énorme problème à Strasbourg où les bouchons ne sont pas si fréquents et le stationnement loin d'être une calamité comme à Paris, Lyon ou à peu près toutes les villes du Sud.
    Au contraire, je trouve que pour ce sujet Strasbourg peut servir d'exemple à bien d'autres villes ! N'est-il pas agréable de se promener quasi partout au plein milieu de la route ? Les espaces piétons sont nombreux, et pourtant il n'est pas impossible de se garer en ville, même en plein centre !
    Les Strasbourgeois sont des cyclistes. Dommage qu'on ait loupé le vélove ou autre vélib' par contre...

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